Ce jeudi soir, à Kérity, le ciel était clair, le vent léger, mais c’est une déferlante musicale qui a submergé l’église Sainte-Thumette pendant une heure, pour le plus grand bonheur du public saisi, puis emporté par l’exubérance de l’œuvre et la maîtrise de son interprétation (servie aussi par l’excellente acoustique du lieu).
Véronique Briel, (« Les Rencontres musicales »), au piano, accompagnée de deux «complices», Patricia Reibaud au violon, David Simpson au violoncelle, nous ont offert (après le troisième mouvement de la seconde sonate pour violoncelle de Rachmaninov) le Trio op. 50, de Tchaikowski.
Œuvre gigantesque, cette sorte d’oraison funèbre fut composée en 1882 en hommage « A la mémoire d’un grand artiste », le pianiste Nicolaï Rubinstein, ami très cher qui venait de décéder. Les trois mouvements et leurs variations sont autant d’expressions de tristesse, de mélancolie, de douleur, de colère tragique : rien du requiem, même profane. On passe du mineur au majeur, du majeur au mineur ; quelques respirations : une valse, une mazurka, la mélodie d’une chanson populaire (?) s’invitent de façon inattendue. Réminiscences des moments heureux partagés par les deux musiciens ? Ici piano, violon et violoncelle ne s’accompagnent pas, mais s’appellent, se répondent, s’entrelacent, et ce, durant presqu’une heure.
Autant d’obstacles pour les interprètes qui ont relevé le défi avec énergie et brio. La partition de piano est connue pour être une des plus difficiles. La coda finale – où le piano martèle en sourdine les premières notes du Dies Irae – est résolument funèbre : le public ne s’y est pas trompé, sidéré quelques secondes avant d’applaudir longuement ce magnifique concert.
Merci à tous les trois, Véronique, Patricia et David.