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Les Soirées de Tunvezh 2022

Musique française

    Église Sainte-Thumette, mardi 9 août au soir : c’était la première « Soirée de Tunvezh » de la saison. Clotilde Lacroix, familière de nos concerts depuis quelques années, entourée de ses amis, nous a entraînés dans un voyage à travers la musique française de la première moitié 20ème siècle et même… du 21ème …
Voilà donc donc un groupe d’amis et de musiciens qui ont visiblement du plaisir à travailler, chercher, jouer ensemble. Clotilde Lacroix au violoncelle, Alphonse Cemin au piano, Guillaume Latour au violon, le baryton basse Damien Pass nous avaient déjà séduits l’année dernière ; ils ont été rejoints cette année par Iris Zerdoud à la clarinette, musicale, souple et énergique.
     Dans le trio de Fauré, violon, piano, clarinette se répondaient avec intensité et fougue. Et dans le trio de Debussy : le son de la clarinette accompagnée par le piano « orchestre » était un véritable bonheur.
    Avec Olivier Messiaen (« Liturgie de cristal », « Danse de la fureur »), nos musiciens étaient tour à tour célestes ou violents. N’oublions pas Damien Pass, dont la voix chaude et puissante servait parfaitement toutes les mélodies du programme et semblait très complice de l’espièglerie d’Eric Satie.
     Et surprise à la fin du concert, un poème musical (non prévu au programme) de Melie Boltz Nasr, une cosmogonie plus que fantastique mise en musique par le jeune compositeur Arthur Lavandier, présent dans l’église. Compositeur d’opéras, d’arrangements musicaux, entre autres, Arthur Lavandier nous a proposé là, à partir d’instruments « classiques », la voix de Damien Pass, une musique que l’on peut trouver dissonante, sauvage mais dont l’étrangeté et la violence ne laissent pas indifférents.
     Un beau voyage, donc, apprécié par le public qui a longuement applaudi, bissé, ce groupe de jeunes musiciens. Merci à eux pour ce programme qui a eu l’audace de s’éloigner des grands voies baroques et romantiques.

 

Rachmaninov et Chostakovitch

      Eglise Sainte Thumette, jeudi 11 : c’est à un autre voyage que Véronique Briel et Vincent Leterme nous ont conviés en terres russes et slaves. Les deux pianistes, toujours aussi complices, étaient accompagnés comme l’an dernier de Patricia Reibaud au violon, et cette année, de Frédéric Lubiatto au violoncelle. Après le romantisme mélancolique du jeune Rachmaninov – trio élégiaque en hommage à Tchaikowski, Véronique Briel et Vincent Leterme ont exécuté à quatre mains quatre danses de Dvorak (polka, scottish…) avec le brio et la musicalité qui les caractérisent. Et, en plus, ils avaient l’air de bien s’amuser ! Emportée par le rythme, la petite fille assise devant moi, dont je ne voyais qu’une nuque bronzée surmontée d’un minuscule chignon blond, battait sagement mais vigoureusement la mesure…
     Après ce moment élégant, alors que les « vestiges du jours » disparaissaient progressivement derrière les verrières du chœur et que ce n’était pas encore tout à fait l’heure des chauves-souris, une musique tragique, violente souvent, a déferlé dans l’église dans un crescendo puissant : le Trio n° 2 du compositeur soviétique Dimitri Chostakovitch pour piano, violon et violoncelle. Un faisceau d’éléments concourt à l’ambiance funèbre de l’œuvre composée en 1944 : la mort d’un ami proche, les drames de la guerre, la découverte par les troupes soviétiques du camp de concentration et d’extermination de Majdanek en Pologne ; son Finale développe un thème populaire juif, et l’on entend une danse macabre dans l’Allegretto de la fin, rythmée par un si répété au piano.
     Le public a applaudi longuement, qui avait retenu son souffle, sidéré par la force de l’œuvre et de l’interprétation ; la sueur perlait au front des musiciens. Longs applaudissements aussi à la fin du, concert, public debout, après le « bis » proposé par Patricia Reibaud en hommage à l’Ukraine : une « Melodya », mélodie du compositeur ukrainien Myroslav Skorik (1938-2020).
Emotion, beauté de la musique : du romantisme au tragique contemporain. Merci à Véronique, Vincent, Patricia et Frédéric.
 

Musiques du 20ème siècle

     Troisième et dernière « Soirée de Tunvezh » de la saison, troisième aventure dans laquelle Gaspard Dehaene au piano et Sandro Compagnon au saxophone nous ont entraînés avec bonheur samedi soir. Soirée où les premières gouttes de pluie tant attendues ont accompagné les premières notes de la sonatine de Ravel. Mais la suite – un programme bâti sur le thème de la mélodie – nous a vite fait oublier l’orage. Le saxophone (soprano, ici), instrument récent et vite adopté par les musiciens du 19ème siècle (bien avant l’apparition du jazz) est voué à la mélodie par sa large tonalité de couleurs, nous a expliqué Sandro ; le son de ce saxophone peut se rapprocher facilement de celui du hautbois, de la clarinette, de la flûte (et même de la flûte de Pan, comme dans l’interprétation d’une des danses roumaines de Bartok). D’où la possibilité et l’intérêt de transcrire et d’arranger certaines partitions pour le saxophone soprano : la sonatine de Ravel était à l’origine une version piano et hautbois comme la sonate de Poulenc, le final de la sonate de Prokofiev une version piano et violon, les mélodies grecques de Ravel une version piano et voix, toutes arrangées pour le saxophone. Sandro Compagnon manie à merveille ces transcriptions, explore toutes les possibilités de son instrument et nous entraîne vers des sonorités renouvelées au cœur d’œuvres connues.
    Nous connaissions déjà Gaspard Dehaene, dont c’est la troisième saison de concerts à Kérity ; il nous avait enchantés par ses interprétations de Chopin et Schubert, nous nous sommes donc réjouis de le revoir. Nous le retrouvons dans un nouveau rôle : complice et partenaire brillant de Sandro. Il est redevenu un moment soliste pour nous jouer l’Impromptu n° 3 de Schubert – on restait dans le registre de la mélodie – tout en précision, fluidité et légèreté. Et que dire des danses roumaines de Bartok ? Légères, rapides, parfois nostalgiques ? Si ce n’avait été la retenue de mise dans une église, notre ami Bernard C. était prêt à entamer quelques pas de danse. Donc un public conquis, ravi, récompensé par trois « bis » généreux.
Merci à vous, Gaspard et Sandro, pour ces moments lumineux.
 

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