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« Quatuor à cordes »

   La musique en quatuor à cordes est une des plus exigeantes. Ecoute, réponse, échange des motifs entre les instruments : pari magnifiquement gagné hier soir, samedi, pour notre second concert. Deux œuvres classiques, le Trio op. 9 numéro 3 en do mineur de Beethoven et le Quatuor op. 76 numéro 4 de Haydn encadraient le contemporain Archipel II de Boucourechliev. Clotilde Lacroix au violoncelle, Robin Kirklar à l’alto, Constance Ronzatti et Marie Salvat au violon, de toute évidence heureux de jouer ensemble, ont non seulement manifesté leur grande virtuosité, mais nous ont aussi montré, avec rigueur et sensibilité tout ce qu’un instrument à cordes pouvait exprimer. La musique de Beethoven et Haydn projetée dans la nef, se lovait derrière chaque pilier pour finalement nous envelopper dans une conversation entremêlée, mais avec des respirations, et chaque instrument gardait sa voix indépendante.
     Plus dépaysant a été pour la majorité d’entre nous Archipel II (composé en 1968) par Boucourechliev. Ce compositeur, pianiste à l’origine, grand connaisseur de Haydn et de Beethoven a consacré sa vie à la recherche en musicologie, ouvrant un espace peu connu : là encore, ces quatre cordes ont démontré toutes leurs possibilités. Plus de partition linéaire, une œuvre ouverte, mais avec, sur la partition, des indications (rythme, hauteur du son, etc.) très précises du compositeur qui donne ainsi aux musiciens la liberté de naviguer d’une proposition, d’un pôle, ou îlot, à l’autre, d’où « Archipel » ; ils deviennent alors responsables de la forme, de la durée et de l’articulation de la musique. Ces propositions sont matérialisées par un type de graphie propre à Boucourechliev. Ce n’est pas de l’improvisation, mais ce ne sera jamais tout à fait le même morceau qui sera joué puisque les interprètes peuvent varier dans leurs choix. Résultat : un cheminement dans un « paysage » purement abstrait où l’on ne retrouve ni le bruit de la source ou des vagues, ni le chant des oiseaux, mais des rubans de sons, étouffé, à peine audibles, ou brusquement dilatés, nous enveloppant dans une conversation où chaque instrument, ici aussi, garde son individualité comme en quatuor classique ; jamais de stridence, jamais de brutalité : voyage interstellaire ? Voyage intérieur ? Quelle bonne idée Clotilde, de nous avoir fait découvrir, entre deux classiques, cette œuvre très rarement jouée et inconnue du grand public !
     Les inquiets seront rassurés avec le quatuor de Haydn qui a suivi, et un bis, de Haydn, encore. Les applaudissements nourris du public, très à l’écoute ont salué ces moments exceptionnels.
 
Merci à vous, Clotilde, Constance, Marie, Robin pour votre présence, votre énergie, votre conviction !
 
Anne-Sylvie Moretti


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